Le regard d'un journaliste sur notre vie ...
Une journée avec les sœurs Augustines
Elles vivent à Pont-l’Abbé au sein de leur monastère depuis 1860.
Pourtant, leur présence séculaire est drapée de mystère.
Qui sont vraiment les sœurs Augustines ?
Exceptionnellement, les religieuses nous ont ouvert leurs portes.
Le temps d’une journée. Voici le récit de ces quelques heures passées à leurs côtés.
Publié dans "Le Télégramme" le 08 octobre 2019 par Steven Lecornu
7 h 15. La grande porte en bois du monastère s’ouvre lentement. Sœur Maryvonne apparaît. Elle arbore un large sourire. « Bienvenue », annonce-t-elle à voix basse. La prieure (responsable) nous conduit jusqu’à la chapelle. C’est (déjà) l’heure de la messe. En fait, elle a débuté à 7 h. Mais les premières prières ont commencé dès 6 h 30 avec les laudes. Sous la voûte, les sœurs, onze au total, se recueillent et chantent. L’acoustique est superbe. L’office, comme tous les autres, est ouvert au public. Ce n’est pas la foule dès potron-minet.
7 h 40. Direction la salle à manger pour le petit-déjeuner. Chacun prend ses couverts. Sur la table : café, pain beurre, laitages, fruits… Du classique. La collation se partage dans le silence. Drôle de sensation.
8 h 20. Une partie des sœurs, les plus jeunes, se dirige vers l’hôpital. Les religieuses accompagnent et prodiguent des soins aux patients. C’est la particularité de la communauté. Quelques mètres seulement séparent le monastère de l’établissement de santé. Quatre sœurs y officient à plein temps en tant qu’aides-soignantes.
12 h 30. Retour à la chapelle pour l’office « du milieu du jour ». « Prier, c’est notre nourriture, c’est fondamental », confie sœur Marie-Jean. Originaire de Lesconil, elle est au monastère depuis 1957, la plus ancienne en terme de présence.
12 h 45. C’est l’heure du déjeuner. Au menu : carottes râpées/sardines, sauté de bœuf à l’échalote/haricots au beurre, fromages, fruits. Plutôt équilibré. La nourriture est livrée par la cuisine centrale de l’hôpital. Plusieurs récipients sont disposés sur la table pour le tri sélectif. Les sœurs luttent contre le gaspillage et alimentent, par la même occasion leur compost. Pendant le repas, sœur Joanna effectue une revue de presse à voix haute. C’est la seule autorisée à prendre la parole. Elle cite le magazine Pèlerin mais aussi Le Télégramme.
13 h 15. Sœur Éliane et sœur Marie-Jean sont préposées à la vaisselle. Dans le monastère, les religieuses assurent plusieurs missions très précises, « selon leurs compétences ». La machine est bien rodée. La division du travail est très précise au sein du monastère. Chaque soeur s’attèle à des taches selon leurs compétences.
13 h 45. Pause récréative dans la salle de communauté. Les sœurs forment un cercle. « J’ai une bonne nouvelle à vous annoncer : l’ascenseur a été réparé ! », sourit sœur Maryvonne. Enthousiasme et soulagement dans l’assemblée. Sœur Joanna donne des nouvelles de sœur Ewelina actuellement en Pologne au sein de sa famille. La correspondance s’effectue par mail. Le monastère est équipé d’ordinateurs. Les sœurs sont branchées. Il y a même la wifi.
14 h 30. Petite balade dans le parc situé derrière le monastère à l’abri des regards. L’endroit, totalement inconnu du grand public, est remarquable. Il s’étend sur plusieurs hectares. Cet imposant espace vert abrite un petit potager, un étang et surprise… Un cimetière ! Depuis leur arrivée à Pont-l’Abbé, en 1860 et la création du monastère, toutes les sœurs reposent ici. Sur les tombes, leur date de naissance, celle de leur décès mais aussi celle de leur engagement dans la communauté.
15 h 30. Dans le monastère, les sœurs vaquent chacune à leurs activités. Sœur Eliane se consacre à la liturgie, autrement dit elle prépare les chants et les textes qui seront lus lors des messes. Côté, buanderie, on retrouve sœur Marie de la Croix qui raccommode un tablier. Sœur Marianna, de son côté, a enfilé une tunique bleue pour jardiner. Quant à sœur Joanna, elle s’affaire dans la sacristie. Elle prépare les ornements pour la messe du lendemain matin. Dans la salle de communauté, trois sœurs sont installées devant la télé. Elles regardent la chaîne KTO à la télévision qui diffuse en direct la récitation du chapelet depuis Lourdes. Imperturbables.
15 h 45. On suit sœur Maryvonne jusqu’à la résidence du Prat, maison de retraite récemment rénovée à quelques pas du monastère. Là-bas, elle a rendez-vous avec Georgette, une patiente. La religieuse offre une petite balade à la centenaire. « Ça fait du bien de prendre l’air », confie cette dernière. « La présence des sœurs est très importante pour les personnes âgées, c’est un repère très précieux », explique la prieure.
17 h 45. Retour à la chapelle pour les vêpres, l’office que l’on célèbre le soir.
18 h 30. Quelques sœurs repartent travailler à l’hôpital.
19 h 30. Repas. Au menu : poisson à l’oseille accompagné de pommes de terre vapeur.
20 h 30. Retour (encore !) à la chapelle pour l’office des complies, la dernière prière de la journée. La journée est marquée par de nombreux temps de prières.
20 h 45. Les sœurs regagnent leur chambre individuelle. Place à la lecture spirituelle. « À partir de ce moment-là, c’est vraiment le grand silence. Seul un événement grave pourrait l’interrompre », indique sœur Maryvonne.
22 h 30. Extinction des feux.